L'art de recevoir (édition 1936) de La Cuisine Raisonnée
Recevoir ses amis autour d'une table élégamment dressée, c'est un des plaisirs les plus agréables de la vie familiale. Malgré les difficultés de l'heure et les obstacles de la vie chère, les maîtresses de maison aiment toujours à recevoir. C'est un agrément pour elles de soigner à la fois la parure de la table, la délicatesse du menu et de suivre avec intérêt les propos qui s'échangent dans ce décor charmant.
En vue d'être utile à nos lectrices encore jeunes et inexpérimentées, nous passerons successivement en revue les règles d'étiquette concernant les dîners, les soupers, les lunchs, les thés et les convenances qu'impose l'art de recevoir.
DÎNERS
Il y a plusieurs sortes de dîners: dîners de famille, dîners intimes ou semi-intimes, de cérémonie, de société ou d'apparat. Les dîners intimes et de cérémonie sont les plus agréables. Nous ne parlerons ici que des usages relatifs à ces repas. Les règles générales du savoir-vivre s'appliquent également aux diners ordinaires et d'apparat.
DÎNERS DE CÉRÉMONIE
Les dîners de cérémonie sont donnés par des personnes occupant une position aisée et qui, sans craindre le ridicule, peuvent se conformer aux règles de l'étiquette. Les gens qui donnent à dîner sont tenus d'être savants en art culinaire, lors même qu'ils auraient la sobriété des anachorètes. Si l'on ne peut offrir à ses hôtes la table luxueuse à laquelle ils sont habitués, on ne doit pas les inviter, tout simplement. Se borner à n'entretenir de relations qu'avec des gens de sa condition est une grande sagesse.
Cela posé, nous dirons que les personnes délicates et bien élevées ont le souci du bien-être de leurs hôtes; elles ne négligent aucuns frais compatibles avec leurs moyens lorsqu'elles offrent à dîner, ne fût-ce qu'à des amis intimes, à des parents même.
1. Lorsque les convenances obligent à donner un diner, il convient de déterminer d'avance le nombre et la qualité des convives.
De même qu'il peut être indiscret de réunir dans une même invitation des personnes qui se gêneraient mutuellement, il importe tout autant de ne pas omettre celles dont l'exclusion serait blessante. C'est dire qu'on doit faire preuve de tact, de circonspection et de délicatesse en lançant les invitations.
2. La manière la plus cordiale d'inviter à dîner est de le faire verbalement: « Vous serait-il possible de venir dîner chez moi tel jour. .. à telle heure?» ou: « Voudriez-vous me faire l'honneur ou le plaisir de venir, etc.?» Cette formalité ne dispense pas de la carte d'invitation.
3. L'invitation aux dîners privés est faite en général pour 7 h 30 ou 8 heures, huit jours d'avance; pour les dîners ordinaires, trois jours; pour les dîners d'apparat, 15 jours.
4. Les invitations officielles, ou à caractère de solennité, se font le plus souvent par billet:
Monsieur A ... offre à Monsieur B ... l'expression de son respect et le prie de lui faire l'honneur de venir dîner chez lui tel jour ... telle heure ... Ou bien: a l'honneur de lui offrir, etc ...
Dans des circonstances moins solennelles:
Voudriez-vous me faire l'amabilité de venir dîner chez moi, tel jour? ... On peut ajouter au bas de la lettre: R. S. V. P. (Répondez s'il vous plait).
Quel que soit le genre de dîner, l'invité doit faire connaitre immédiatement, par écrit, son acceptation ou son refus, afin que l'on puisse disposer de sa place. Un retard à ce sujet serait un manquement grave aux convenances.
5. On doit arriver chez ses hôtes dix à quinze minutes avant l'heure fixée, jamais après. Les maîtres du logis sont au salon, plutôt préoccupés de bien recevoir leurs invités que des apprêts de la réception. Les paroles aimables s'échangent avec les présentations; on a des attentions pour les personnes âgées.
6. La tenue diffère suivant les invitations. Dans les dîners de cérémonie, l'homme porte l'habit; la maîtresse de maison, une toilette simple et de bon goût.
7. Le cuisinier a le devoir d'être aussi ponctuel que les convives. À l'heure dite, un domestique ou une bonne ouvre les deux battants de la porte et annonce à haute voix: « Madame est servie.» C'est la phrase sacramentelle; toute autre dénoterait un manque total de savoir-vivre. Le maître ou la maîtresse de maison désigne à chaque invité la darne à laquelle il doit offrir son bras.
Lorsqu'il s'agit d'un grand dîner auquel sont conviés un certain nombre d'invités, les messieurs trouvent sur un plateau, dans l'antichambre, de petites enveloppes de forme allongée, lesquelles contiennent un carton portant ce qui suit:
Monsieur A ... est prié d'offrir le bras à Madame B ...
C'est le bras gauche qu'un homme doit offrir, sauf lorsqu'il s'agit d'un militaire que le port du sabre oblige à offrir le bras droit, et qui conserve cette habitude, même s'il n'est pas en tenue. Ce même officier n'enlèvera jamais son épée, dans un salon, avant que la maitresse de maison ne l'y ait invité, ce qu'elle ne doit pas oublier de faire.
À LA SALLE À MANGER
Pour aller du salon à la salle à manger, le maître de la maison passe le premier, en offrant le bras gauche à la femme qu'il doit mettre à sa droite, et qui lui a été désignée d'avance. Les autres couples suivent alors, et la maîtresse de maison ferme la marche au bras de l'invité le plus important et qui doit, à table, occuper la place d'honneur à sa droite. Les hommes franchissent les portes les premiers, cela facilite le passage aux dames qu'ils conduisent. Il n'y a d'exception à cette règle que pour un prince de maison royale; dans ce cas, la maîtresse de maison entre la première avec lui; de même pour un cardinal qui a rang de prince du sang, comme prince de l'Église et héritier présomptif de la tiare. Ce privilège s'étend également aux évêques. Dans les familles chrétiennes, on traite avec la même déférence le prêtre que l'on considère comme le représentant de Notre-Seigneur sur la terre. Si on ne peut donner aux ministres de la religion la préséance à laquelle ils ont droit, parce qu'on veut honorer un autre convive, il vaut mieux ne pas les inviter.
Après le diner, c'est la maîtresse de maison qui passe la première au salon, toujours au bras du même invité, car elle doit se trouver au salon avant ses invités pour les y recevoir. L'ordre de passage est alors interverti, et le maître de maison, avec la personne qu'il accompagne, ferme la marche.
PRÉSÉANCE À TABLE
Le maître et la maîtresse de maison, tenus de veiller commodément au bien-être des convives, s'asseyent l'un en face de l'autre au milieu de la plus grande longueur de la table. Les places d'honneur, pour les dames, sont la droite puis la gauche de l'hôte, et pour les hommes la droite et la gauche de la maîtresse de maison. Il n'est pas d'usage de mettre au même rang d'honneur les deux membres d'un même ménage. On observe les préséances en comptant alternativement de droite et de gauche.
Le maître ou la maîtresse de maison doivent céder leur place à table à un évêque dans son diocèse ou à tout haut dignitaire ecclésiastique. C'est une besogne très délicate que d'assigner à chacun la place qui lui est due. En principe, il y a le rang social et l'âge, mais que de circonstances dont il faut tenir compte! Le tact seul peut nous guider dans ce dangereux dédale.
SAVOIR-VIVRE
Si, dans un dîner, on se croit mal placé, avec un manque d'égards évident, on n'en doit pas souffler mot, ni en paraître indigné, quitte à ne plus accepter d'invitation dans cette maison.
Les politesses se bornent, de part et d'autre, à quelques mots polis que l'on échange aussitôt assis, afin de rompre la glace.
Chaque invités' occupe exclusivement de sa voisine de droite.
La conversation vient-elle à languir, c'est au maître et à la maîtresse de maison à la relever, à y jeter une note gaie et à détourner adroitement toute parole désobligeante ou toute discussion trop vive. Un sujet particulier à quelques personnes de la compagnie n'est nullement de mise. Le tact ne viole jamais cette loi, même une minute. Les arts, la littérature, les voyages, les affaires, etc., peuvent fournir matière aux entretiens. La politique serait une source d'ennuis.
En cas d'irrégularité dans le service, les maîtres rappellent le serveur à l'ordre, au moyen d'un signe ou d'un mot à voix basse; les observations à haute voix sont contre les bienséances.
On pourrait avancer que les maîtres de la maison, le jour où ils reçoivent, ont à oublier leur propre personnalité. Leur devoir est de se mettre à la disposition de leurs invités et de prévenir leurs moindres désirs.
Par ailleurs, les hôtes contractent des obligations envers ceux qui les accueillent; ainsi, ils se gardent de les critiquer ou d'émettre des observations sur la manière dont ils sont servis. Leur attitude témoigne plutôt du plaisir et de la reconnaissance pour tout ce que le maître et la maîtresse de maison ont fait d'agréable.
En vue d'être utile à nos lectrices encore jeunes et inexpérimentées, nous passerons successivement en revue les règles d'étiquette concernant les dîners, les soupers, les lunchs, les thés et les convenances qu'impose l'art de recevoir.
DÎNERS
Il y a plusieurs sortes de dîners: dîners de famille, dîners intimes ou semi-intimes, de cérémonie, de société ou d'apparat. Les dîners intimes et de cérémonie sont les plus agréables. Nous ne parlerons ici que des usages relatifs à ces repas. Les règles générales du savoir-vivre s'appliquent également aux diners ordinaires et d'apparat.
DÎNERS DE CÉRÉMONIE
Les dîners de cérémonie sont donnés par des personnes occupant une position aisée et qui, sans craindre le ridicule, peuvent se conformer aux règles de l'étiquette. Les gens qui donnent à dîner sont tenus d'être savants en art culinaire, lors même qu'ils auraient la sobriété des anachorètes. Si l'on ne peut offrir à ses hôtes la table luxueuse à laquelle ils sont habitués, on ne doit pas les inviter, tout simplement. Se borner à n'entretenir de relations qu'avec des gens de sa condition est une grande sagesse.
Cela posé, nous dirons que les personnes délicates et bien élevées ont le souci du bien-être de leurs hôtes; elles ne négligent aucuns frais compatibles avec leurs moyens lorsqu'elles offrent à dîner, ne fût-ce qu'à des amis intimes, à des parents même.
1. Lorsque les convenances obligent à donner un diner, il convient de déterminer d'avance le nombre et la qualité des convives.
De même qu'il peut être indiscret de réunir dans une même invitation des personnes qui se gêneraient mutuellement, il importe tout autant de ne pas omettre celles dont l'exclusion serait blessante. C'est dire qu'on doit faire preuve de tact, de circonspection et de délicatesse en lançant les invitations.
2. La manière la plus cordiale d'inviter à dîner est de le faire verbalement: « Vous serait-il possible de venir dîner chez moi tel jour. .. à telle heure?» ou: « Voudriez-vous me faire l'honneur ou le plaisir de venir, etc.?» Cette formalité ne dispense pas de la carte d'invitation.
3. L'invitation aux dîners privés est faite en général pour 7 h 30 ou 8 heures, huit jours d'avance; pour les dîners ordinaires, trois jours; pour les dîners d'apparat, 15 jours.
4. Les invitations officielles, ou à caractère de solennité, se font le plus souvent par billet:
Monsieur A ... offre à Monsieur B ... l'expression de son respect et le prie de lui faire l'honneur de venir dîner chez lui tel jour ... telle heure ... Ou bien: a l'honneur de lui offrir, etc ...
Dans des circonstances moins solennelles:
Voudriez-vous me faire l'amabilité de venir dîner chez moi, tel jour? ... On peut ajouter au bas de la lettre: R. S. V. P. (Répondez s'il vous plait).
Quel que soit le genre de dîner, l'invité doit faire connaitre immédiatement, par écrit, son acceptation ou son refus, afin que l'on puisse disposer de sa place. Un retard à ce sujet serait un manquement grave aux convenances.
5. On doit arriver chez ses hôtes dix à quinze minutes avant l'heure fixée, jamais après. Les maîtres du logis sont au salon, plutôt préoccupés de bien recevoir leurs invités que des apprêts de la réception. Les paroles aimables s'échangent avec les présentations; on a des attentions pour les personnes âgées.
6. La tenue diffère suivant les invitations. Dans les dîners de cérémonie, l'homme porte l'habit; la maîtresse de maison, une toilette simple et de bon goût.
7. Le cuisinier a le devoir d'être aussi ponctuel que les convives. À l'heure dite, un domestique ou une bonne ouvre les deux battants de la porte et annonce à haute voix: « Madame est servie.» C'est la phrase sacramentelle; toute autre dénoterait un manque total de savoir-vivre. Le maître ou la maîtresse de maison désigne à chaque invité la darne à laquelle il doit offrir son bras.
Lorsqu'il s'agit d'un grand dîner auquel sont conviés un certain nombre d'invités, les messieurs trouvent sur un plateau, dans l'antichambre, de petites enveloppes de forme allongée, lesquelles contiennent un carton portant ce qui suit:
Monsieur A ... est prié d'offrir le bras à Madame B ...
C'est le bras gauche qu'un homme doit offrir, sauf lorsqu'il s'agit d'un militaire que le port du sabre oblige à offrir le bras droit, et qui conserve cette habitude, même s'il n'est pas en tenue. Ce même officier n'enlèvera jamais son épée, dans un salon, avant que la maitresse de maison ne l'y ait invité, ce qu'elle ne doit pas oublier de faire.
À LA SALLE À MANGER
Pour aller du salon à la salle à manger, le maître de la maison passe le premier, en offrant le bras gauche à la femme qu'il doit mettre à sa droite, et qui lui a été désignée d'avance. Les autres couples suivent alors, et la maîtresse de maison ferme la marche au bras de l'invité le plus important et qui doit, à table, occuper la place d'honneur à sa droite. Les hommes franchissent les portes les premiers, cela facilite le passage aux dames qu'ils conduisent. Il n'y a d'exception à cette règle que pour un prince de maison royale; dans ce cas, la maîtresse de maison entre la première avec lui; de même pour un cardinal qui a rang de prince du sang, comme prince de l'Église et héritier présomptif de la tiare. Ce privilège s'étend également aux évêques. Dans les familles chrétiennes, on traite avec la même déférence le prêtre que l'on considère comme le représentant de Notre-Seigneur sur la terre. Si on ne peut donner aux ministres de la religion la préséance à laquelle ils ont droit, parce qu'on veut honorer un autre convive, il vaut mieux ne pas les inviter.
Après le diner, c'est la maîtresse de maison qui passe la première au salon, toujours au bras du même invité, car elle doit se trouver au salon avant ses invités pour les y recevoir. L'ordre de passage est alors interverti, et le maître de maison, avec la personne qu'il accompagne, ferme la marche.
PRÉSÉANCE À TABLE
Le maître et la maîtresse de maison, tenus de veiller commodément au bien-être des convives, s'asseyent l'un en face de l'autre au milieu de la plus grande longueur de la table. Les places d'honneur, pour les dames, sont la droite puis la gauche de l'hôte, et pour les hommes la droite et la gauche de la maîtresse de maison. Il n'est pas d'usage de mettre au même rang d'honneur les deux membres d'un même ménage. On observe les préséances en comptant alternativement de droite et de gauche.
Le maître ou la maîtresse de maison doivent céder leur place à table à un évêque dans son diocèse ou à tout haut dignitaire ecclésiastique. C'est une besogne très délicate que d'assigner à chacun la place qui lui est due. En principe, il y a le rang social et l'âge, mais que de circonstances dont il faut tenir compte! Le tact seul peut nous guider dans ce dangereux dédale.
SAVOIR-VIVRE
Si, dans un dîner, on se croit mal placé, avec un manque d'égards évident, on n'en doit pas souffler mot, ni en paraître indigné, quitte à ne plus accepter d'invitation dans cette maison.
Les politesses se bornent, de part et d'autre, à quelques mots polis que l'on échange aussitôt assis, afin de rompre la glace.
Chaque invités' occupe exclusivement de sa voisine de droite.
La conversation vient-elle à languir, c'est au maître et à la maîtresse de maison à la relever, à y jeter une note gaie et à détourner adroitement toute parole désobligeante ou toute discussion trop vive. Un sujet particulier à quelques personnes de la compagnie n'est nullement de mise. Le tact ne viole jamais cette loi, même une minute. Les arts, la littérature, les voyages, les affaires, etc., peuvent fournir matière aux entretiens. La politique serait une source d'ennuis.
En cas d'irrégularité dans le service, les maîtres rappellent le serveur à l'ordre, au moyen d'un signe ou d'un mot à voix basse; les observations à haute voix sont contre les bienséances.
On pourrait avancer que les maîtres de la maison, le jour où ils reçoivent, ont à oublier leur propre personnalité. Leur devoir est de se mettre à la disposition de leurs invités et de prévenir leurs moindres désirs.
Par ailleurs, les hôtes contractent des obligations envers ceux qui les accueillent; ainsi, ils se gardent de les critiquer ou d'émettre des observations sur la manière dont ils sont servis. Leur attitude témoigne plutôt du plaisir et de la reconnaissance pour tout ce que le maître et la maîtresse de maison ont fait d'agréable.
Source: La cuisine raisonnée
Provenance: La cuisine raisonnée, édition abrégée
Recette
32783, publiée le
2023-05-30 à 11:32, 143 vues